mercredi 11 février 2009

La bureaucratie de la recherche.

Les fondations aiment bien répandre la manne sur des projets de grande envergure, plus faciles à "administrer" que des volées de projets artisanaux, comme elles aiment à favoriser les projets Scientifiques avec un grand S (ce qui revient à dire qu'à force de les banaliser on les a rendus "inoffensifs"), car elles ne veulent pas se signaler à l'attention de la politique. Les grandes fondations encouragent donc les recherches bureaucratiques à grand déploiement sur les problèmes de petit calibre, et recrutent à cette fin des intellectuels administrateurs. En second lieu on a les jeunes recrues, qui seraient plutôt des conseillers techniques que des sociologues (...) Ces jeunes gens sont moins insatisfaits que méthodiques; ils ont moins d'imagination que de patience; ils sont avant tout dogmatiques - dans toute l'acception historique et théologique du terme (...) L'enjeu est clair; si la sociologie n'est pas autonome, elle ne saurait être une entreprise à responsabilité collective. (...) Dans la mesure où le sociologue isolé laisse des bureaucraties s'immiscer dans son travail, il perd son autonomie de chercheur; dans la mesure où la sociologie s'identifie à un travail bureaucratique, elle perd son autonomie sociale et politique.


(C. Wright Mills, L'imagination sociologique, trad. P. Clinquart, La Découverte, pp 108-111)

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